Celle de l’accueil passe sa vie ici. Je me demande bien où elle a dormi puisqu'elle m’a laissé sa chambre pour la nuit ? Un peu défrâichie, comme la plupart des chambres de la pension, elle a des yeux clairs qui veulent encore voir le monde et savent sourire. Passé dans sa petite intimité (quelques mètres carrés), je n’ai pas eu le courage de regarder d’un peu plus près ses affaires : un carnet sombre d'où dépassait la photo d’un homme, l’emballage presque intact d’une mini-chaîne, quelques paires de chaussures neuves derrière les rideaux. Et quoi d’autre ? L'accent du Brésil et puis cette vie-là.
Je ne demande pas où est passé le petit vieux d’il y a deux ans; celui qui semblait à bout de course, agité de quintes de toux monstrueuses et qui s'endormait devant les matchs de foot. Ai-je peur de la réponse ?
Je ne demande pas où est passé le petit vieux d’il y a deux ans; celui qui semblait à bout de course, agité de quintes de toux monstrueuses et qui s'endormait devant les matchs de foot. Ai-je peur de la réponse ?
Le soir, voitures et tramways provoquent de petits tremblements de terre. Les sirènes à l’américaine des voitures de flics incendient un peu plus le paysage qui subitement retombe dans une profonde torpeur. Quelque chose d’irréel s’en dégage comme on ouvre plus grand la fenêtre.
De ma chambre, je peux presque toucher l'immeuble d'en face, à moitié ravalé à moitié abandonné. Sur le toit, deux antennes. La plus rouillée balance doucement et semble tenir à sa voisine un joli discours voire, d'entretenir, obstinément, un dialogue qui, faute de réponse, s’étire tristement; si bien que le beau cirrus qui passait au-dessus a disparu remplacé par l’azur intense qui, pour le coup, n’inspire plus que mélancolie.
Sur la droite, l’immeuble où était né Mario Sa de Carneiro, le grand ami de Pessoa, suicidé à l’hôtel de Nice à Pigalle.
De ma chambre, je peux presque toucher l'immeuble d'en face, à moitié ravalé à moitié abandonné. Sur le toit, deux antennes. La plus rouillée balance doucement et semble tenir à sa voisine un joli discours voire, d'entretenir, obstinément, un dialogue qui, faute de réponse, s’étire tristement; si bien que le beau cirrus qui passait au-dessus a disparu remplacé par l’azur intense qui, pour le coup, n’inspire plus que mélancolie.
Sur la droite, l’immeuble où était né Mario Sa de Carneiro, le grand ami de Pessoa, suicidé à l’hôtel de Nice à Pigalle.
Le drapeau italien, arrimé à la façade de la pension, se met à flotter, pour une raison mystérieuse. Dans l’immeuble d’en face, seul l’aquarium donne signe de vie, éclairant des bureaux bien rangés et des piles de documents vouées à des activités inconnues : assurances ? Immobiliers ? Les journaux disent que la ville se vide. En dehors des étrangers et des bobos, qui a encore les moyens de résister à l’assaut frénétique du capital ? La partie abandonnée de l’immeuble donne la mesure du futur possible de Lisbonne.
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